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Engrais azotés : « On va devoir explorer de nouveaux modèles d’affaires »

« Le comportement d’achat des agriculteurs est en train de changer », estime Renaud Bernardi, directeur commercial de LAT Nitrogen France, ici au côté de Clémence Lenoir, chargée d'études économiques grandes cultures de FranceAgriMer, jeudi 27 février, au Sia.

Renaud Bernardi, directeur commercial de LAT Nitrogen France, ne s’attend pas à une baisse significative de prix des engrais azotés ni à court terme ni à plus long terme. Et plaide pour aller vers de nouveaux modèles de commercialisation.

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À l’occasion d’une conférence de FranceAgriMer dédiée au marché des engrais azotés, jeudi 27 février, au Salon de l’agriculture, le directeur commercial de LAT Nitrogen France, Renaud Bernardi, a fait un point sur le marché actuel des engrais azotés. Ils ne semblent pas près de se déprécier car le prix du gaz naturel, qui constitue 80 % de leur coût, est revenu ces derniers mois à des niveaux relativement élevés, au-delà des 40 €/MWh, voire proche des 50 €/MWh.

L’ammonitrate autour de 550 €/t

« Et on n’attend pas une baisse significative du prix du gaz. À court terme, il va rester supérieur à 40 €/MWh », entrevoit-il, l’Europe devant trouver d’autres sources d’approvisionnement que la Russie.

Logiquement, l’ammonitrate, qui coûte actuellement après des semaines d’inflation autour de 450 €/t départ usine, à des niveaux pas revus depuis deux ans, ne devrait pas voir son prix se détendre. Tout comme la solution azotée et l’urée, en raison d’une demande accrue en provenance de l’Inde.

« Produire des engrais verts sans aides ne sera pas possible »

Et de rappeler que « l’industrie européenne des engrais azotés est confrontée à ses plus grands défis depuis des décennies : les prix de l’énergie restent élevés, la demande est inférieure de plus de 10 % à son niveau d’avant-crise, la pression des importations persiste ». Les importations européennes d’urée, qui sont passées de 4 Mt avant le conflit Ukraine-Russie à 6,9 Mt en 2022, sont toujours bien prégnantes, de l’ordre de 5,7 Mt en 2024.

Par ailleurs, « les quotas de CO2 gratuits vont diminuer jusqu’à devenir nuls en 2035, et les industriels vont devoir acheter de plus en plus de carbone sur le marché, ce qui va renchérir le prix des fertilisants en Europe. » Lesquels vont perdre en compétitivité également à l’exportation. Avant le conflit, l’Europe exportait 8 Mt d’engrais azotés (aujourd’hui 6 Mt) « qui devront trouver un nouveau foyer en Europe ».

Tout en sachant que « produire des engrais verts sans aides du gouvernement ne sera pas possible tellement les Capex sont importants : au moins plusieurs centaines de millions d’euros ».

« Une position d’attentisme qu’il faut faire sauter »

En outre, Renaud Bernardi signale que « le comportement d’achat des agriculteurs est en train de changer ». Certes, cette évolution est davantage marquée dans le reste de l’Europe qu’en France où la morte-saison (mai-juin) est encore assez dynamique, mais une baisse des commandes à l’automne est observée. « Certains agriculteurs, par problème de trésorerie, repoussent leurs achats au dernier moment. Mais les tonnes qui ne sont pas produites en octobre-novembre-décembre ne seront pas fabriquées en janvier-février-mars, à un moment où les usines sont en pic de production. » Ce qui induit un risque de baisse de disponibilité au printemps, au moment des utilisations.

« Il y a une position d’attentisme qu’il faut faire sauter. On va être obligé d’explorer de nouveaux modèles de commercialisation de nos engrais pour que chaque acteur de la chaîne de valeur trouve un équilibre entre la nécessité d’acheter en temps et en heure et celle de limiter les risques. Sachant que la distribution agricole ne va pas stocker et l’agriculteur non plus. Je n’ai pas la réponse mais on va devoir trouver quelque chose. »

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